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Hong Kong | Festival du film asiatique de Deauville 2005

Breaking News

Hong Kong | 2004 | Un film de Johnnie To Kei-Fung | Avec Richie Chen, Kelly Chen, Nick Cheung Ka-Fai, Eddie Cheng Siu-Fai, Hui Siu-Hung, Lam Suet, Simon Yam Tat-Wah, Maggie Siu Mei-Kei

This is a great show...

Cheung (Nick Cheung) et ses hommes sont sur les traces du groupe mené par Yuan (Richie Chen), criminels en provenance du Mainland. Leur filet se resserre, dans l’isolement d’une ruelle de Hong Kong. Il suffit de l’intervention de deux policiers chargés de la circulation, pour que la situation dégénère ; un soupçon de trop de la part d’un agent qui ne sait pas qu’il est au cœur d’une traque. En un instant, Yuan et ses comparses ouvrent le feu, la ruelle devient le théâtre d’un affrontement sans pitié. Les « méchants » parviennent à s’enfuir dans un fourgon de police ; le combat reprend dans une autre rue, au hasard d’un accident de la circulation documenté par une chaîne de télé locale. Devant les yeux et caméras des journalistes, un flic lève les mains au ciel en signe de soumission, pour éviter que Yuan ne l’abatte. Après avoir éliminé l’un des leurs, blessés, les criminels prennent la fuite pour de bon.

La réaction de l’opinion publique est immédiate : cette image de capitulation de la police assène un coup de massue à la réputation de la police, dont l’efficacité est remise en cause. Rebecca Fong (Kelly Chen) suggère à ses supérieurs d’offrir aux médias ce qu’ils veulent, dans le but de redorer le blason des forces de l’ordre : une collaboration totale avec la presse au cours de l’arrestation de ces criminels impassibles, vécue en live ou presque - après quelques manipulations d’images. Commence un redoutable jeu d’échec entre l’ensemble des forces anti-criminelles (OCB, SDU...) et l’entité menée par Yuan ; jeu au cœur duquel Cheung, flic borné et peu soucieux de ces problématiques de popularité, est bien décidé à s’immiscer...

A intervalles réguliers, Johnnie To s’en revient au genre qui a fait sa réputation méritée : le polar. Après avoir ancré PTU au cœur de la nuit hongkongaise, pour un film dont l’inertie nocturne trouve écho dans le sublime Collateral de Michael Mann, le réalisateur délaisse son comparse Wai Ka-Fai pour un nouveau projet de réalisation pure, diurne cette fois : Breaking News. Réminiscence d’un Full Alert teinté de médiatisation contemporaine, le nouvel opus/hommage à l’ex-colonie du réalisateur est un film simple, transcendé par une réalisation impeccable.

Si Breaking News a fait parler de lui, lors du dernier Festival de Cannes et en dehors, c’est certainement pour ses prouesses de mise en scène - en tête desquelles le plan séquence d’ouverture de près de 8 minutes. Bien plus qu’un exercice de style, cette séquence à la chronologie redoutable s’avère être un véritable outil narratif. Les protagonistes du film nous y sont présentés avec une économie qui est celle de la maîtrise scénaristique, les seuls traits de caractères dessinés étant ceux nécessaires à leur existence au sein d’un espace/temps restreint, lieu de l’action certes, mais avant tout d’une réaction. Car ce plan séquence s’il a un rôle de confinement narratif, sert avant tout à mettre en place les rouages d’une réaction, d’une chaîne d’évènements qui, au terme du plan séquence (avec l’explosion) aboutit à une véritable entrée dans l’action de la part des « héros » du film. Celle-ci n’est pas de leur fait ; ils ne la déclenchent pas mais l’assument. Ces huit minutes servent au moteur de Breaking News à atteindre son plein régime, avec un « couple » mécanique qui est celui de l’entraînement mutuel et proactif, de Yuan et de Cheung - du noir et du blanc.

Si Breaking News se veut à priori manichéen, le personnage interprété par Kelly Chen perturbe cette volonté. Rebecca est pourtant de ses propres mots (adressés à Simon Yam, s’il vous plaît), adepte du tout blanc et du tout noir. C’est, paradoxalement, sa décision de rentrer dans le jeu des médias qui offre un terrain d’expression au « gris », et à toutes les teintes qu’il peut revêtir. Les images et leur manipulation, permettent à chaque entité - police et « méchants » - de se redéfinir : héroïque pour l’une, gentils et humains pour les autres. Cette humanité - a priori absente aussi bien de Yuan, trop froid, que de Cheung, trop obstiné (magnifique contre-emploi de Nick Cheung) - s’exprime notamment au travers des mensonges mis en scène par Rebecca et son équipe. Seul Cheung refuse de participer au jeu du paraître ; il reste fidèle à sa volonté de coincer Yuan, coûte que coûte. Quoiqu’il en soit au terme du jeu, Yuan lui-même, pourtant habile manipulateur, choisira de rester un « méchant », tandis que Rebecca affirmera sa volonté de ne pas se teinter de gris.

Breaking News est un film d’action savamment teinté d’humour ; un humour tantôt potache (les gaz du coéquipier de Cheung) qui permet de tracer le quotidien des policiers sans rendre l’ensemble trop pédagogique. On pourrait reprocher au film le peu d’utilisation qu’il fait des images « presse ». Cependant ses plans séquences et ses split-screens - qui mettent en place d’autres séquences d’action/réaction - sont trop bien utilisées pour que l’ensemble pâtisse d’un quelconque manque. Breaking News est assurément une réussite iconoclaste de plus à mettre à l’actif de son réalisateur, qui illustre continuellement le titre du chef-d’œuvre de l’un de ses anciens poulains : « expect the unexpected ».

Breaking News est disponible en DVD HK (copie anamorphique magnifique) chez Media Asia. Les suppléments sont peu nombreux, mais les sous-titres sont impeccables - et c’est déjà ça !

- Article paru le samedi 16 octobre 2004

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