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Corée du Sud

A Moment to Remember

aka The Eraser in my Head | Corée du Sud | 2004 | Un film de Lee Jae-han | Avec Jeong Woo-seong, Son Ye-jin, Kim Boo-seon, Baek Jong-hak

Le mélo est un domaine casse gueule, dans lequel on ne sait jamais sur quel pied danser. Il suffit la plupart du temps de peu de choses, pour casser l’harmonie nécessaire à la réussite de ce genre d’histoires. Les craintes du spectateur peuvent donc se montrer assez lourdes lorsqu’il entend que la base du film repose sur une histoire d’amour sur fond de maladie d’alzheimer. On sent clairement que l’on est dans la zone rouge du cinéma à kleenex.

J’avoue avoir attendu très longtemps avant de me décider à voir ce film. Au fond de moi quelque chose me poussait à attendre, comme si, pertinemment, je savais qu’il n’était pas encore l’heure de le visionner. Une chose est claire : j’ai bien fait d’attendre. Certaines œuvres demandent à ne pas être prises à la légère, et A Moment to Remember (ici abordé dans sa version Director’s Cut) fait clairement partie de cette catégorie. De toute les comédies dramatiques coréennes que j’ai vu, ce film s’érige sans peine dans mon Top 3. De tels monuments de finesse et d’émotions ne courent pas les rues. Le plus agréable en effet, est la délicatesse avec laquelle le réalisateur aborde le thème de la maladie. Aucune lourdeur ni abus de sirop ne plombent cette magnifique histoire d’amour, unissant ce charpentier bourru et cette jeune fille à qui rien ne laisse présager du malheur qui tape à sa porte.

La propension du cinéma coréen à explorer les différentes facettes de l’amour ne cessera de m’émerveiller. Là où le cinéma français s’enlise dans la comédie romantique à l’humour crasse et le cinéma US dans celle de la route aux clichetons, les coréens choisissent celle du cinéma qui sonne vrai. Certes la forme est classique, mais ce qui prime c’est le résultat - et au baromètre de l’émotion, nous sommes face à un Homerun. Dès le début de A Moment to Remember, on sent que quelque chose ne colle pas avec cette jeune fille. Soit elle est la plus ravissante étourdie qui soit, ou alors autre chose se trame. Là où d’autres réalisateurs nous auraient infligés la maladie et sa chute irrémédiable dès le premier quart d’heure, Lee Jae-han joue la carte de la lenteur salvatrice. Par touches minimes mais suffisantes pour faire comprendre de quoi il retourne, il installe les pièces de son échiquier. En nous imbriquant lentement et sûrement dans la vie de ses protagonistes, il rend la lente dégradation de l’héroïne encore plus pénible. Sans une héroïne le héros n’est rien ; vieil adage de la comédie romantique qui ici, une fois de plus, est bel et bien respecté. Le duo d’acteur menant la barque de cette histoire est criant d’humanité, une qualité qui de plus en plus dans l’univers si aseptisé du mélo a tendance à manquer. Mention spécial à l’acteur Jeong Woo-seong, car c’est sur lui que repose la plus grande partie de l’histoire. Tâche très peu facile vu la difficulté du sujet.

D’un extrême à l’autre son personnage va devoir faire l’expérience de tout ce que la vie de couple a de pire et de meilleur. Bourru et hautement désagréable au départ de l’aventure, il laisse lentement poindre à l’horizon ses failles. Des failles qui au premier abord laissent craindre l’utilisation de grosses ficelles lacrymales. Et bien pas du tout ; aussi bien sur le front de ses problèmes familiaux que sur celui de ses problèmes personnel, ces faiblesses se montrent utiles à l’histoire. Elles ne sont pas là pour la plomber et faire inutilement chialer dans les maisons autour de la télé, non. Ce sont bel et bien des éléments dramatiques qui servent à faire avancer l’histoire. Ma phrase est peut être banale et ce que je dis d’une évidence affligeante - mais combien de comédies oublient d’appliquer ce genre de choses à bon escient ? Hein, combien ? Faites le calcul et vous verrez que le nombre est conséquent.

A Moment to Remember réussit à faire exister, dans ce Director’s Cut, des personnages bouleversants de réalisme, attachants au possible. Là où d’autres auraient sombré face à la difficulté du sujet, ce film se paye le luxe de rester à flot pendant deux heures et demi, et de nous faire voir aussi au-delà de l’histoire. La réflexion sur ce que représente l’amour dans notre existence, lorsque celui-ci s’efface sous nos yeux, est passionnante. De plus, comment ne pas chavirer pour cette fin... Tout le lent cheminement et le développement des personnages n’avaient pour but principal que de magnifier la fin de ce film qui vous fera mettre un genoux à terre. Beau, émouvant et sincère, A Moment to Remember est un mélo de première classe, comme seuls les coréens sont capables d’en créer.

A Moment to Remember est disponible en DVD coréen, sous-titré en anglais, chez CJ Entertainment.

- Article paru le mardi 2 août 2005

signé Marcus Burnett

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