2002
J’ai une théorie bien à moi, qui se trouve étayée à chaque nouveau film mis en boîte par le peu prolifique (pour un hongkongais) Wilson Yip : je crois bien que ce dernier est un ami personnel de Tsui Hark. Pourquoi ? Et bien parce que, si jamais ce n’est pas le cas, c’est que ces deux-là s’envoient exactement les mêmes produits périmés en intraveineuse. Vous croyez aux coïncidences, vous ? Peut-être, peut-être pas... Toujours est-il que, après l’effarant Skyline Cruisers, on aurait pu croire que Wilson Yip reviendrait à des films un peu plus terre à terre (sans pour autant devenir banal, attention). 2002 est-il synonyme d’assagissement ? Ca dépend si vous considérez que croiser Men in Black avec Ghostbusters et The Frighteners et y rajouter un soupçon de L’écureuil rouge, le tout pour tenter de donner une espèce de descendance aux moines chasseurs d’esprits des différentes Histoires de Fantômes Chinois, vous paraît une entreprise simple et saine d’esprit.
Sur papier, le projet à tout pour paraître excitant, c’est certain. Maintenant, quand on connaît la propension grandissante de Wilson Yip à s’affranchir d’une certaine cohérence, on ne peut pas être véritablement surpris par le résultat. Encore que...
Au sein de la police, l’unité 2002 s’occupe de tout ce qui ne peut être expliqué : une équipe d’intervention spéciale qui traite directement avec les criminels d’outre-tombe, si vous préférez. Les effectifs de cette équipe sont cependant quelque peu réduits, puisqu’ils se limitent à un humain et un fantôme. Le jeune Tide (Nicholas Tse), qui possède certains pouvoirs psychiques lui permettant de voir les esprits, fait ainsi équipe avec Sam (Sam Lee), fantôme et ami pour qui l’heure de la réincarnation approche rapidement. Un lien très fort unit les deux entités, puisque c’est Tide qui est responsable de la mort de Sam : autrefois coéquipiers au sein de la police, Tide a raté son coup lors d’une prise d’otages et a descendu son ami. Mais Sam n’est pas plus rancunier que ça, et pour cause : le pauvre Tide est victime d’une espèce de malédiction. La tache qu’il a dans la paume, la "Black Star", le condamne à mener à la mort tous ceux qui deviendront ses amis durant sa vie.
Une fois Sam réincarné, Tide se doit de se trouver un nouveau coéquipier. Les signes l’amènent à choisir, étrangement, un flic bien vivant en la personne de Wind (Stephen Fung). Ce dernier, qui possède lui aussi des talents spéciaux, a bien du mal à séparer le monde des vivants de celui des ectoplasmes. Qui plus est, la vue du moindre fantôme maléfique le paralyse littéralement de peur.
Alors que l’équipe a déjà un peu de mal à se stabiliser, un esprit vengeur - le Water Ghost - va encore compliquer la situation pour Tide...
Sur cette base scénaristique plutôt alléchante, Wilson Yip construit malheureusement - comme c’était déjà le cas pour Skyline Cruisers - un film un peu trop déséquilibré.
L’introduction avec Sam Lee, pour commencer, est soit trop longue, soit trop courte, mais pose un véritable problème au spectateur : quelle importance a donc ce personnage ? Va-t-on le revoir au cours de l’histoire ? La réponse à cette dernière question est non. En fait, Sam Lee est là : 1) Parce que c’est le pôte de Wilson Yip et qu’il joue dans tous ses films ; 2) uniquement pour introduire la "malédiction" de Tide. Un premier film dans le film qui perturbe déjà pas mal le rythme de narration.
Arrive ensuite l’un des héros de Gen-X Cops et de sa suite Gen-Y Cops pour reformer le "dynamic duo" du surnaturel, j’ai nommé Stephen Fung (peu de temps auparavant à l’affiche de My Schoolmate the Barbarian avec le même Nicholas Tse). Son personnage, censé compléter le duo protagoniste du film, va être la source d’un nouvel égarement narratif : une histoire d’amour incomplète en forme de repompage de L’écureuil rouge, donc, où Wind s’amourache d’une jeune femme dans le coma après que le fantôme de sa grand-mère ait demandé aux deux membres de 2002 de veiller sur elle. Wind décide de se faire passer pour son petit ami à son réveil.
Là-dessus se greffe tant bien que mal la quête punitive du Water Ghost, désireux de venger l’esprit de sa petite amie, privée de réincarnation par Tide quelques jours auparavant (chinois). Le tout amenant donc Wilson Yip à fournir un minimum syndical de trois films en un (et encore, je ne compte pas l’amourette de Tide avec l’infirmière), tous au détriment les uns des autres...
Reste tout de même une réalisation plutôt réussie, une ambiance et un univers vraiment intéressants bien que sous-exploités (comme cette façon de brûler des représentations d’objets pour les faire passer dans le monde des morts), et un duo d’acteurs sympathique bien que là encore déséquilibré - le personnage de Stephen Fung étant bien moins développé que celui de Nicholas Tse.
Et puis aussi cette fin optimiste et maladroite, qui nous laisse une fois de plus deviner derrière tout ce fouilli une volonté sincère de divertir et de transmettre certaines émotions. De ce côté-là, le contrat de Wilson Yip est rempli, et c’est pour cela que 2002 parvient tout de même, bien que de manière frustrante, à être fort agréable à suivre... avant de nous mener à la conclusion suivante : ça aurait pu être pire comme ça aurait pu être bien mieux !
DVD HK all-zone (et VCD) édité par Golden Harvest Home Video.
Pour une fois, une copie - au format - vraiment belle, aux couleurs éclatantes et à la définition précise. Le 5.1 est très efficace, et les sous-titres anglais plus pertinents qu’à l’habitude.
Au niveau suppléments, un making-of (non sous-titré) et le trailer du film, ainsi qu’une présentation (en anglais et en chinois) de ses personnages principaux.