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Japon | Rencontres

Hideo Nakata

"Mon rôle est d’essayer de trouver un moyen de concilier le réel et l’irréel, et le quotidien est un terrain qui s’y prête bien."

De la découverte d’une vocation...

"Quand j’étais enfant, je pense que je voyais déjà plus de films que la moyenne. Lorsque j’étais au collège notamment, j’étais un très grand fan de François Truffaut. Cependant, ce n’est qu’au cours de ma dernière année à l’université que j’ai décidé de faire du cinéma mon métier.

A l’époque, je participais à un séminaire sur le cinéma, et je voyais environ 300 films par an. Ensuite je suis rentré aux studios Nikkatsu, au sein desquels j’ai travaillé en tant qu’assistant réalisateur sur des roman porno. De là, il semblait assez naturel de devenir moi-même réalisateur ; je pensais que je pourrais le faire au sein de la Nikkatsu, mais c’était une période difficile pour la société et j’ai du attendre un certain temps avant que se concrétise une opportunité.

Jusqu’à ma dernière année à l’université donc, je me contentais de voir des films : cela me satisfaisait et me suffisait. Ce n’est qu’à partir du moment où j’ai été amené à réfléchir à la manière dont les films étaient faits que j’ai eu envie de participer moi-même à la réalisation."

De l’importance de l’amour...

"L’amour était un élément essentiel pour développer le drame exposé dans Dark Water : la nouvelle à la base du film est très courte, et j’étais donc bien obligé de développer la relation entre la mère et sa fille pour parvenir à un long-métrage. Néanmoins c’est un sentiment très différent de celui développé dans Ring, puisque ce n’est pas un amour entre un homme et une femme. Dans le cas de Ring, je voulais avant tout faire un film qui fasse peur. La relation développée par le couple divorcé est plus secondaire.

A l’avenir toutefois, j’aimerais faire des films plus "normaux", pouvoir m’attarder simplement sur les relations entre différents protagonistes, ou encore l’amour qui unit deux personnes."

D’une conception du film d’horreur...

"Je ne pense pas faire des films d’horreur qui diffèrent vraiment des films occidentaux, en matière de conception de l’horreur. Un film comme La Maison du diable de Robert Wise, par exemple, est un film qui ne s’attarde pas vraiment sur le quotidien, mais parvient à faire peur sans jamais montrer de fantôme à l’image. Je trouve qu’il y a une technique, une maîtrise très impressionnantes sur ce film. J’ai aussi été fortement influencé par les films de Carl Dreyer.

Il faut cependant bien faire face à une réalité, qui ne se limite pas à mes adaptations des romans et nouvelles de Kôji Suzuki : il faut montrer des fantômes, c’est ce que les spectateurs attendent !

En réalité, les gens ne voient pas de fantômes au quotidien, pour la bonne raison que ceux-ci sont complètement irréels. Pourtant il faut les montrer, sans que cette contradiction ne soit évidente : mon rôle est donc d’essayer de trouver un moyen de concilier le réel et l’irréel, et le quotidien est un terrain qui s’y prête bien. Dans Ring, c’est Sadako, que l’on voit plusieurs fois dans le film, qui incarne ce lien. Dans Dark Water, c’est cette petite fille qui est morte enfermée dans un réservoir et qui revient hanter son appartement."

De l’influence de Nobuo Nakagawa...

"Quand j’ai fait Ring et Ring 2, j’ai regardé de nombreuses fois Tokaido-Yotsuyakaidan de Nobuo Nakagawa (cf. article), qui est certainement l’un des réalisateurs japonais qui m’a le plus influencé. Bien que ce film m’ait vraiment marqué et soit à mes yeux l’un des chefs-d’œuvre du film de fantômes, il m’est difficile d’expliciter exactement ce en quoi il m’a inspiré pour Ring et Ring 2.

Alors que Sadako dans Ring est certainement plus un démon qu’un fantôme, je pense que Mitsuko, la fillette de Dark Water, ressemble beaucoup au fantôme de Tokaido-Yotsuyakaidan. Celui-ci met en scène une femme qui a été assassinée et revient se venger ; ses victimes sont déterminées, et elle est inoffensive pour des gens qui n’ont rien à voir avec la tragédie qu’elle a vécue.

Même si dans Dark Water l’héroïne et sa fille emménagent dans cet appartement un peu par hasard, ce n’est finalement pas complètement un hasard si le fantôme de Mitsuko s’attaque à elles. Dans ce rapprochement avec l’œuvre de Nakagawa, je pense que Dark Water développe une forme d’horreur plus traditionnelle que celle explicitée dans Ring et Ring 2, qui est à la fois plus moderne et plus universelle."

Propos recueillis le mardi 28 janvier 2003 à l’Hôtel Raphael, à l’occasion de la sortie française de Dark Water - avec l’aide d’Olivier Lehmann (Kumite). Interview réalisée avec la participation de Elan films. L’équipe de SdA tient à remercier tout particulièrement Céline Petit du Public Système Cinéma.

- Article paru le dimanche 9 février 2003

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